Toutes deux adorent la mer. Sarah et Samar, bénévoles de la première heure, se remémorent leurs révoltes, leurs joies et leurs espoirs lors des moments fondateurs d’une mobilisation citoyenne qui a permis d’affréter un bateau-citoyen pour sauver des vies en mer. Dix ans plus tard, alors que cet élan porte toujours SOS MEDITERRANEE, elles le disent haut et fort : « Nous sommes toujours là ! »
Syrienne d’origine, Samar a connu la guerre et l’exil. C’est à Marseille qu’elle est arrivée avec sa famille. Peu de temps après, Sophie Beau – qui allait devenir la co-fondatrice puis la directrice de l’association – l’invite à un pique-nique entre ami.e.s sur la plage de l’Estaque. Ce soir-là, elle l’embarque dans « un projet qui me semblait totalement au-delà de notre capacité. Mais je me suis dit que si un jour ça marchait, ce serait incroyable ! »
Tout comme Samar, Sarah participe aux premières réunions de la poignée de bénévoles qui commencent à réfléchir au projet. Elle travaille dans le monde de la production audiovisuelle, et va mobiliser tout son réseau pour faire connaître la cause. La mort du petit Aylan en 2015, cet enfant retrouvé sur la plage de Bodrum en Turquie, avait éveillé les consciences sur une réalité brutale encore méconnue : les naufrages en Méditerranée. « Moi, ça m’avait beaucoup choquée, ça m’avait remuée. Je n’arrivais plus à me baigner dans la mer », se souvient Sarah.
« C’est là qu’on a assisté à cet extraordinaire élan de solidarité ! »
C’est ce même sentiment d’indignation qui va mobiliser la petite vingtaine de citoyen.ne.s pour lancer ce projet titanesque et rassembler un nombre croissant de bénévoles, de personnalités publiques, de donatrices et de donateurs. « Je pense que le projet de SOS MEDITERRANEE est venu répondre à cette indignation, ce désarroi que nous ressentions toutes et tous » poursuit Sarah.
Au fil de leur promenade sur les quais du Mucem, le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, qui a vu la création de SOS MEDITERRANEE et d’où l’Aquarius a quitté Marseille en 2016, elles égrainent les souvenirs. « Tu te souviens de la première conférence de presse au Mucem ? » demande Sarah. « Oui, il y avait environ 300 personnes » s’enthousiasme Samar. Et d’évoquer le crowdfunding qui avait permis de récolter 275 000€ en un temps record – à peine de quoi tenir trois semaines en mer -, l’euphorie devant l’arrivée de l’Aquarius à Marseille, les premières séances de sensibilisation scolaire, leur effarement lorsqu’elles découvrent les images des premiers sauvetages, la rencontre d’un rescapé sur le stand d’un festival…
« Mais ce qui m’a vraiment marquée » poursuit Samar, « c’est la mobilisation sur le long terme, et le nombre de personnes qui agissent avec nous et qui ne fait qu’augmenter. J’ai vu des bénévoles qui étaient parmi nous dès 2015, qui sont toujours là dix ans plus tard, et qui s’investissent à fond ! Pour moi, ces bénévoles font du sauvetage à terre au même titre que nos équipes en mer. Et les 90 000* donatrices et donateurs qui nous ont permis de tenir dix ans en mer ! C’est ça, la chaîne de la solidarité ! »
« On est toujours là ! » conclut Sarah. « Les bénévoles sont toujours là ! Les artistes qui nous soutiennent sont toujours là. Les marins, les acteurs culturels, les collectivités territoriales qui nous soutiennent malgré tout. Oui, vous êtes toujours là. Et vous êtes toujours plus nombreux et nombreuses ! »
* Au total, 90 000 donateurs et donatrices ont soutenu l’association depuis 2015.
Crédits video : Camille Rovera/SOS MEDITERRANEE
Photo : Julie Bégin/ SOS MEDITERRANEE