Le Naufrage : un podcast sur un drame entouré de silence
9 avril 2024
« Mayday ! Mayday ! » Cet appel désespéré résonne encore comme un profond traumatisme pour l’équipe de l’Ocean Viking. Dans ce podcast du grand reporter Sina Mir relatant le naufrage mortel du 21 au 22 avril 2021, des voix venues de la Méditerranée nous font revivre l’interminable et vaine recherche d’une embarcation en détresse perdue dans la tempête en pleine nuit dans le silence de la mer, des autorités maritimes, des médias…   

Pour écouter les épisodes du podcast sur votre plate-forme préférée, cliquez ici.

Les quatre épisodes de 30 minutes chacun de cette série « L’ Affaire » seront progressivement mis en ligne sur les différentes plateformes dès le 27 mars  : 1.  Le Naufrage, 2.  Le Blocage, 3.  Le Silence et 4.  Les Disparus. Des extras vous attendent également!

Comme en écho, les voix de personnalités politiques et médiatique de premier plan recherchent, avec le journaliste Sina Mir, les causes de ce naufrage et de tant d’autres ces 10 dernières années. Ces questionnements, ils ont également été formulés lors de l’écoute publique du premier volet de cette enquête inédite en avant-première à la Gaité lyrique le 22 mars dernier, lors d’un débat réunissant la géographe Camille Schmoll, le politologue François Gemenne et la directrice de SOS MEDITERRANEE, Sophie Beau.   

« Et puis un jour, j’ai découvert ces enregistrements radio. Et là, ça n’a plus été possible de passer à autre chose. »  

Sina Mir journaliste et grand reporter 

« Ce naufrage, j’en ai parlé à l’époque où je travaillais à la radio » explique Sina Mir, journaliste et grand reporter, qui était monté sur l’Aquarius en 2016 et suivait depuis les actualités de SOS MEDITERRANEE. Dans ce podcast, il décortique les tenants et aboutissants du naufrage du 22 avril 2021 qui a fait 130 morts, au travers de quatre épisodes de la série l’Affaire, signé Paradiso. « Et puis après la diffusion, je suis passé à autre chose. Enfin j’ai essayé. Mais chaque fois que je prenais des nouvelles des sauveteurs avec qui j’étais resté en contact, ce naufrage revenait dans les conversations, comme un trauma qui continuait de les hanter. Et puis un jour, j’ai découvert ces enregistrements radio. Et là, ça n’a plus été possible de passer à autre chose. »  

Crédit Photo : Flavio Gasperini / SOS MEDITERRANEE

La première voix que l’on entend est celle de Morgane, dont c’était la première mission en mer à bord de l’Ocean Viking.  « Ça a été une mission éprouvante et surtout teintée d’un silence assourdissant ; silence dans la nuit, pendant nos recherches [de l’embarcation en détresse], silence des autorités maritimes » qui malgré les appels à l’aide répétés, n’ont jamais donné suite aux demandes de coordination de l’Ocean Viking. La suite on la connaît. Après 24 heures de recherche, « ce que l’on voit d’abord, ce sont des gilets de sauvetage qui se rapprochent. Puis voilà, on se rend compte qu’il y a des gens à l’intérieur. Des visages dans l’eau, qui ne se relèvent pas. Alors que nos gilets de sauvetage à nous sont désespérément vides.  Et on ne peut que s’imaginer comment ces personnes-là ont été arrachées par la violence des vagues, sont tombées dans une eau glacée qui vous saisit chaque membre, et ont sombré sans être entendues par personne, dans une indifférence la plus totale. »  

Justine, sauveteuse elle aussi à sa première mission, n’a à offrir qu’un moment de silence à toutes ces personnes dont les corps s’offrent à sa vue. « Je me dis que les gens doivent oublier que ce sont des humains. (…) Je ne comprends pas qu’on laisse à la mer le soin d’étouffer le sujet des migrations qu’on ne veut pas voir. » Un an plus tard, c’est par écrit qu’elle se demande « que reste-t-il de ce naufrage ? ».  

« C’est un moment de honte que sont ces deux jours durant lesquels ils ont appelé à l’aide en vain. »  

Le Pape François 

Puis dans les épisodes suivants, se succèdent les témoignages et analyses croisées de personnalités comme François Hollande et Sophie Beau, qui reviennent sur les mécanismes qui se sont mis en place dès 2014, alors que le nombre de morts en Méditerranée atteint des sommets, ou encore l’écrivain Marc Lévy qui se demande « Pourquoi cette indifférence de la presse ? Cette indifférence des journalistes ? Cette indifférence des politiques ? Cette indifférence des intellectuel.le.s ? » Le silence des médias est lui aussi soumis à l’analyse de Sina Mir qui cite différents acteurs civils et reconstruit peu à peu le puzzle où chaque pièce a mené à ces morts. On y entend même le Pape François : « 130 migrants sont décédés en mer. Ce sont des personnes, ce sont des vies humaines. C’est un moment de honte que sont ces deux jours durant lesquels ils ont appelé à l’aide en vain. »  

Enfin, la voix de Ruby, bénévole pour la ligne d’urgence Alarm Phone, qui était en contact constant avec les naufragé.e.s avant que leur téléphone satellitaire ne s’éteigne dans un silence mortel, nous replonge au cœur du drame. « Une fois la nuit tombée, vous devez imaginer qu’il n’y a personne autour de vous. Alors vous ne pouvez rien voir. Nous avons perdu le contact avec l’embarcation en début de soirée. Nous ne pouvions plus les joindre. (…) Le lendemain matin, nous avons continué de les chercher.  L’Ocean Viking est également arrivé sur zone. Il leur avait fallu des heures pour s’y rendre, les distances étaient énormes ! Ils ont cherché, et à un moment donné [sa voix se brise] nous avons appris qu’il y avait des morts. Quelques jours plus tard, nous avons reçu les premiers appels des familles. Ils nous ont dit qu’ils étaient sans nouvelles d’un frère, d’un fils, d’une fille, qui était parti.e de Khoms le 20 avril dans une embarcation pneumatique, et qu’ils n’avaient plus jamais eu de nouvelles depuis… » 

Le quatrième épisode se termine sur la recherche des personnes disparues. Car ce jour-là, l’Ocean Viking a dû faire le choix difficile de laisser les quelques corps qui flottaient encore autour de l’épave brisée pour répondre à un nouvel appel de détresse. Celui-là s’est soldé par le sauvetage de 236 personnes.  

Crédit visuel en haut de page : Paradiso Media

Crédits pour le podcast  

Voix :  Sina Mir 
Écrit par : Sina Mir avec Suzanne Collin 
Réalisateur, monteur son, sound designer et mixeur :  Adrien LeBlond 
Production : Sina Mir, Suzanne Collin, Louis Daboussy et Léa Warrin 
Enregistrements et montage des bout-à-bouts :  Marec Panchot 
Direction de production : Sandrine Vendel avec Caroline Haller 
Marketing : Jeanne Longhini avec Lilou Delclitte 
Attachée de presse : Gaëlle Job 
Graphiste :  Amélie Pichon 
Producteurs délégués  : Lorenzo Benedetti, Louis Daboussy, Benoit Dunaigre 


Contenu | Menu | Bouton d