Ada* a été secourue par l’Ocean Viking d’une embarcation pneumatique en détresse et surchargée le 7 janvier. Elle fait partie des 37 premières personnes secourues par SOS MEDITERRANEE en 2023. Son sourire à bord cache un monde de douleur, après cinq ans passés en Libye. Voici son histoire.
J’ai quitté le Nigeria à 15 ans à cause de l’insécurité là-bas. J’ai une fille dans mon pays, mais je n’avais pas les ressources nécessaires pour m’occuper d’elle. Mes deux parents sont morts. Je me suis rapidement retrouvée piégée en Libye. Ils m’ont kidnappée, « kalabush » comme ils disent. J’ai trouvé plusieurs emplois, la plupart du temps je nettoyais la maison des gens, mais j’étais rarement payée. Je ne voyais pas d’avenir en Libye, les personnes ne sont pas bien traitées là-bas. J’ai tenté la traversée quatre fois, mais j’ai été renvoyée trois fois jusqu’à aujourd’hui, quand vous nous avez secouru.e.s : « Dieu vous bénisse ».
Les trois fois où j’ai été piégée en mer, j’ai été envoyée directement en prison**. La première fois, [j’ai été emprisonnée] un mois, la deuxième fois trois mois, la dernière fois une semaine. Je pleurais tous les jours là-bas. Ils voulaient une rançon de ma part, mais je n’avais personne à la maison à appeler. Ils ne nous donnaient qu’un morceau de pain par jour et de l’eau salée à boire. J’ai réussi à m’échapper deux fois, et ils m’ont laissé partir une fois, après avoir obtenu ce qu’ils voulaient de moi. Je savais qu’il était très dangereux de monter sur cette embarcation, mais quel autre choix me restait-il ? Je veux être libre ; je veux avoir une vie pour moi, je veux construire un avenir pour ma fille, je ne veux plus être seule.
*Le nom a été changé pour protéger l’identité de la personne rescapée.
** Les personnes rescapées parlent souvent de « geôles » ou de « prisons » lorsqu’elles évoquent leur mise en captivité arbitraire dans des centres de détention informels.
Crédits : Michael Bunel / SOS MEDITERRANEE