Cette publication de SOS MEDITERRANEE a pour but de faire le point sur les évènements qui se sont déroulés en Méditerranée centrale au cours des dernières semaines. Il ne s’agit pas de livrer une revue exhaustive des faits, mais plutôt de fournir des informations sur l’actualité de la recherche et du sauvetage dans la zone où nous intervenons depuis 2016, sur la base de rapports publiés par différentes ONG et organisations internationales ainsi que par la presse internationale.
Plus de 75 morts après le naufrage d’une embarcation au large de la Libye, un nombre élevé de départs en novembre
Malgré des conditions météo difficiles, le nombre d’embarcations de fortune prenant la mer depuis les côtes libyennes est resté très élevé en novembre. Avec 21 opérations de secours, c’est le mois où les ONG ont réalisé le plus de sauvetages depuis janvier 2020.
Novembre a également été marqué par un nombre dramatique de morts en Méditerranée centrale. Plus de 75 personnes auraient trouvé la mort dans un naufrage au large de la Libye le 17 novembre. D’après The Guardian, 15 personnes ont été secourues par des pêcheurs et débarquées à Zouara en Libye. Selon les rescapé.e.s, environ 92 personnes se trouvaient à bord de l’embarcation lorsqu’elle a chaviré au cours d’une tempête. Cette dernière tragédie porte à 1 303 le nombre de morts en Méditerranée centrale cette année, selon l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM).
Le phénomène des grands bateaux de pêche ou autres embarcations transportant plus de 200 personnes s’est amplifié au cours de ces six derniers mois. Le 25 novembre, la journaliste Angela Caponetto a publié une vidéo montrant un bateau de patrouille des garde-côtes italiens portant secours à près de 300 personnes sur une embarcation surchargée, près de Lampedusa. Quelques jours plus tard, les garde-côtes italiens ont également déclaré avoir secouru 244 personnes à bord d’une embarcation surchargée au large de la Calabre, en Italie.
Le même jour, la Marine nationale tunisienne a porté assistance à près de 500 personnes au large des îles tunisiennes de Kerkennah, selon l’agence Anadolu. Depuis le 24 novembre, Alarm Phone n’avait cessé de relayer des alertes signalant cette situation de détresse.
Toujours le 24 novembre, d’après le Times of Malta, l’une des 43 personnes secourues par les forces armées maltaises est décédée à son arrivée à terre. La cause de sa mort n’est pas connue.
Le Sea Watch 4 et le Geo Barents débarquent des rescapé.e.s en Sicile
L’équipe du Sea Watch 4 a porté secours à 482 personnes au cours de sept opérations de sauvetage entre le 18 et le 22 novembre. Parmi les personnes rescapées figurent une femme qui a accouché à bord d’une embarcation en détresse en tentant de traverser la Méditerranée centrale, ainsi que son nouveau-né. Après de multiples évacuations médicales réalisées sur un total de 21 personnes, dans des conditions météo très difficiles, le Sea Watch 4 s’est vu assigner le port sicilien d’Augusta pour le débarquement des personnes rescapées.
186 personnes secourues par l’équipe du Geo Barents de MSF ont été autorisées à débarquer à Messine, en Sicile, le 20 novembre. Les corps de dix personnes, décédées à bord d’une embarcation en bois surchargée, ont été récupérés par l’équipe de sauvetage et ramenés à terre.
Le 21 novembre, l’équipage de l’Astral, voilier de l’ONG espagnole Proactiva-Open Arms, a porté assistance à deux embarcations en détresse transportant respectivement 60 et 70 personnes, jusqu’à ce que les autorités italiennes effectuent le sauvetage et ramènent les rescapé.e.s à terre.
Pour sa part, l’ONG française Pilotes Volontaires, qui patrouille sur l’avion Colibri 2 en Méditerranée centrale, a annoncé qu’elle déplaçait son programme en soutien aux opérations de recherche et de sauvetage vers la route de l’Atlantique, autour des Iles Canaries.
Les garde-côtes libyens poursuivent sans répit les retours forcés pendant que l’envoyé spécial des Nations-Unies démissionne à l’approche des élections en Libye
1 563 personnes ont été interceptées en mer et ramenées en Libye par les garde-côtes libyens au cours de ces trois dernières semaines, selon l’Organisation Internationale pour les Migrations (voir ici, ici et ici). En même temps, Alarm Phone a révélé que le 24 novembre, des coups de feu avaient été tirés depuis un patrouilleur des garde-côtes libyens en direction d’une embarcation en détresse dans la zone maltaise de recherche et de sauvetage, et les personnes à bord ramenées de force en Libye.
L’envoyé spécial des Nations Unies pour la Libye, Ján Kubiš, a démissionné de son poste fin novembre, comme l’a révélé Foreign Policy. Kubiš devrait rester en poste jusqu’à ce qu’un.e remplaçant.e soit trouvé.e, mais il n’est pas certain que cela se produise avant les élections, prévues en Libye le 24 décembre.
Lors d’une conférence des Etats méditerranéens, début décembre, le ministre libyen des Affaires étrangères, Najla Mangoush, a critiqué la politique des Nations Unies consistant à financer des structures en Libye dans le but de dissuader les migrants de partir vers l’Europe. D’après Associated Press, Mangoush a déclaré que l’envoi d’argent à la Libye ne suffirait jamais à « s’attaquer à la racine du problème ».
Photo : Sebastian Sele / SOS MEDITERRANEE