Le 20 novembre, à l’occasion de la Journée internationale des droits de l’enfant, le monde célèbre et agit pour les droits des enfants. Depuis 2016, SOS MEDITERRANEE a secouru 10 387 enfants, dont 80 % voyageaient seuls. Beaucoup ont été victimes de violences physiques et psychologiques. Voici quelques-unes de leurs histoires.
Ali
Ali n’avait que huit ans lorsqu’il a été secouru par l’Ocean Viking en 2024. Il est le plus jeune enfant non accompagné jamais secouru par SOS MEDITERRANEE.
Depuis le Mali, Ali a parcouru le désert à pied pendant un mois, en travaillant à droite et à gauche, notamment dans la soudure et la peinture. En Libye, il dormait dans la rue. « On me battait souvent parce que je suis noir », a-t-il raconté. Après avoir tenté une première traversée de la Méditerranée, Ali a été arrêté par les garde-côtes libyens et emprisonné pendant plusieurs mois. « J’avais peur. Je n’avais pas d’argent pour partir, pour manger. Deux adultes m’ont aidé à m’enfuir ». Ali a été secouru en 2024. Il vit désormais en sécurité dans un foyer pour enfants en Italie et a repris le chemin de l’école, heureux et épanoui. En 2025, il a même revisité l’Ocean Viking.
Un enfant de huit ans ne devrait jamais traverser un désert seul. Un enfant de huit ans ne devrait jamais être emprisonné. Un enfant de huit ans, comme tous les enfants, doit être soigné, protégé et voir ses droits respectés.
Ibrahima
Ibrahima a 14 ans et vient de Gambie. Il a été secouru en mars 2024 après avoir dérivé en mer pendant toute une semaine. Au moins 69 personnes à bord de son bateau sont mortes pendant le voyage. Voici son histoire :
Je m’appelle Ibrahima et je viens de Serekunda, en Gambie. Je voyage seul. J’étais en Libye depuis trois ans avant de décider de partir. [Ibrahima est arrivé seul en Libye, orphelin à seulement 11 ans.] J’ai quitté mon pays après la mort de mes parents. J’ai perdu mon père en 2014 et ma mère en 2021. Avant, j’allais à l’école, mais ensuite je n’avais plus personne pour m’aider. Quelques amis m’ont parlé de personnes voyageant vers l’Europe, alors j’ai décidé de le faire aussi. Je voulais aider ma famille (ma sœur), mes amis. Beaucoup de gens autour de moi n’avaient pas assez à manger. J’ai voyagé de Gambie au Sénégal, au Mali, au Burkina Faso, puis j’ai traversé le désert au Niger avant d’arriver en Libye. J’ai passé deux mois à traverser le désert. Je manquais d’eau et je buvais des mélanges d’huile et d’eau.
En Libye, je travaillais comme laveur de voitures. Là-bas, j’ai été battu par la mafia ; ils m’ont cassé la jambe.
Nous sommes partis de Libye avec 85 personnes, dont quatre femmes et un bébé. Après deux jours, notre moteur est tombé en panne. Ce n’était pas facile. J’ai vu tant de mes amis mourir. Des gens périssaient en chemin à cause du manque de nourriture et d’eau. Il y avait des bateaux de pêche à proximité ; nous faisions des signes, mais personne ne nous voyait. Nous avons dû boire de l’eau de mer pour survivre.
Quand j’ai vu l’Ocean Viking, j’ai pleuré. J’ai pensé : ‘Merci Dieu’. Nous souffrions. Nous n’avions ni nourriture, ni eau. Sur ce bateau, je pensais à ma sœur. Je l’avais appelée le jour où j’avais quitté la Libye et, depuis, je ne lui avais plus donné de nouvelles. Je pensais qu’elle devait s’inquiéter énormément.
Line
Line a six ans. Elle, ses parents et ses jeunes frères et sœurs ont été secourus en décembre 2023.
« Nous tanguions tellement sur le bateau. Nous avons failli chavirer », raconte Line. « Le bateau penchait d’un côté, puis de l’autre, les gens se heurtaient les uns aux autres. Puis le bateau libyen [des garde-côtes] est arrivé, et tout le monde a commencé à crier. Mes parents aussi, parce qu’ils pointaient leurs armes sur nous. »
La famille de Line avait quitté le Liban pour chercher un traitement médical pour sa sœur jumelle, gravement malade. Elle est malheureusement décédée avant leur sauvetage. Le père de Line travaillait 15 heures par jour, sept jours sur sept, ne gagnant que 150 dollars US par mois. La seule nourriture que sa sœur jumelle pouvait avaler était du lait ; chaque paquet coûtait 30 dollars et elle en avait besoin de trois par semaine. Le stress de voir sa jumelle souffrir, puis mourir, a causé à Line des problèmes de dents et de mâchoire.
À bord du navire, Line a confié à notre équipage : « En Allemagne, l’école est géniale. Je pourrai apprendre et étudier. Quand je serai grande, je veux devenir dentiste. »
Pour entendre d’autres témoignages de personnes rescapées, parcourez leurs histoires ici.
Crédits photos : Johanna de Tessières/SOS MEDITERRANEE, Francesca Volpi / SOS MEDITERRANEE
