Comment définir un « cas de détresse » ?  
15 août 2024
Lorsque nos équipes évaluent la situation des embarcations en détresse qu’elles repèrent, elles se basent sur des critères précis, décrits dans le droit maritime international. La nature des embarcations est bien sûr un élément majeur à prendre en compte, mais d’autres facteurs sont aussi déterminants. 

Qu’il s’agisse de ces petites barques en métal ou en fibre de verre, d’immenses rafiots en bois à double pont pouvant contenir jusqu’à 800 personnes entassées, de ces bateaux de pêcheurs rafistolés, des fameuses embarcations pneumatiques assemblées avec des bouts de planches, ou même de voiliers, nous constatons que la quasi-totalité des embarcations rencontrées ne sont pas adaptées à une navigation sûre.  

Les embarcations pneumatiques sont fabriquées avec des matériaux peu résistants et ont tendance à se dégonfler ou à se déchirer sous le poids excessif, exposant les occupant.e.s à la noyade ou à la suffocation lorsque l’embarcation s’écrase sur elle-même. Les bateaux en bois sont quant à eux généralement plus robustes, mais ils présentent un risque élevé de chavirement en raison de la surcharge. Enfin les barques métalliques apparues récemment prennent l’eau et se remplissent rapidement. 

La compréhension de ces risques spécifiques est essentielle pour l’équipe de SOS MEDITERRANEE. Elle lui permet d’adapter sa stratégie de sauvetage à chaque situation, en mettant l’accent sur la prévention des risques les plus immédiats pour la vie des personnes à bord, tout en assurant la sécurité de l’ensemble de l’opération. 

Crédits Photo : Kevin McElvaney/SOS MEDITERRANEE  

Dresser un constat dans l’urgence 

Au moment de dresser l’état des lieux de l’embarcation à secourir, chaque membre de l’équipe a bien en tête la définition d’un « cas de détresse » (Distress case) : c’est une situation lors de laquelle il est raisonnablement certain qu’un navire ou un autre engin, y compris un aéronef ou une personne, est menacé par un danger grave et imminent et a besoin d’une assistance immédiate. Ainsi, selon la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (Convention SOLAS) et la Convention sur la recherche et le sauvetage maritimes (Convention SAR), on doit évaluer la navigabilité, la sécurité et la capacité d’une embarcation à atteindre un port sûr. Or, la majorité des embarcations rencontrées par l’Ocean Viking en Méditerranée centrale ne répondent pas à ces critères de sécurité et nécessitent ainsi une intervention rapide et ciblée. 

Les éléments suivants permettent de définir une situation de détresse : 

  • l’existence d’une demande d’assistance. Bien qu’une telle demande ne soit pas le seul facteur permettant de déterminer l’existence d’une situation de détresse ; 
  • l’état de navigabilité du navire et la probabilité qu’il n’atteigne pas sa destination finale ;  
  • le nombre de personnes à bord par rapport au type et à l’état du navire ; 
  • la disponibilité des approvisionnements nécessaires, tels que le carburant, l’eau et la nourriture, pour atteindre un rivage ;  
  • la présence d’un équipage qualifié et le commandement du navire ;  
  • la disponibilité et la capacité des équipements de sécurité, de navigation et de communication ;  
  • la présence à bord de personnes ayant un besoin urgent d’assistance médicale ; 
  • la présence à bord de personnes décédées ; 
  • la présence à bord de femmes enceintes ou d’enfants ; 
  •  les conditions météorologiques et l’état de la mer 

Comprendre les défis de la mer Méditerranée centrale 

La Méditerranée centrale qui se déploie entre l’Europe et l’Afrique du Nord représente un environnement opérationnel complexe pour mener des missions de sauvetage. Les conditions météorologiques peuvent changer rapidement, passant de calmes à extrêmement turbulentes en peu de temps. En outre, c’est une région immense où les embarcations en détresse peuvent se trouver éloignées et isolées, rendant leur localisation et leur assistance d’autant plus difficile. 

La très grande majorité des embarcations rencontrées par l’Ocean Viking dans cette zone ne sont pas adaptées à un périple en haute mer. Presque toujours surchargées et fragiles, elles ne sont pas conçues pour résister aux conditions maritimes changeantes de la Méditerranée.  

L’Évaluation des situations de détresse en mer 

Lors de l’évaluation qui se fait au moment de la première approche, chaque minute compte et l’analyse doit être minutieuse. Le nombre de personnes à bord est comparé à la taille et à l’état de l’embarcation. Pour ces embarcations surchargées (parfois jusqu’à dix personnes au mètre carré), le risque de chavirement ou d’autres problèmes de stabilité est accru. Ensuite, l’équipe vérifie la disponibilité et le fonctionnement des équipements de sécurité et de communication, essentiels pour gérer les urgences en mer. Dans l’immense majorité des cas, les personnes ne portent pas de gilets de sauvetage. Elles ne disposent souvent ni de réserves de nourriture ni d’eau et ne sont pas équipées de quelque appareil de navigation. 

Ce processus d’évaluation minutieux aide les équipes de SOS MEDITERRANEE à prendre des décisions informées sur la manière de procéder à un sauvetage. Chaque situation est unique et requiert une analyse spécifique pour assurer que les opérations de sauvetage sont à la fois efficaces et sûres pour toutes les personnes impliquées. 

Crédits Photo en première page : Hara Kaminara/SOS MEDITERRANEE 

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