Les 1000 visages de l’engagement citoyen
11 septembre 2024
Voici Alice, retraitée. Lui c’est Patrice Leclerc, maire d’une ville de 50 000 habitant.e.s. Elle se prénomme Albane, flûtiste et performeuse. Il y a aussi Lola, étudiante en histoire, Roland, skipper, Carole, dirigeante mutualiste, Céline, assistante sociale, et tant d’autres… Rencontrez ces personnes qui veulent continuer de croire que l’humanité et la solidarité ont encore de beaux jours devant elles.

« Dès le début de cette aventure, j’ai su que SOS MEDITERRANEE serait un projet citoyen ou ne serait pas » rappelle Sophie Beau, co-fondatrice de l’association et directrice. En 2015, voyant que nos gouvernements européens détournaient le regard devant ces milliers de personnes en détresse en Méditerranée, une petite poignée de citoyen.ne.s décide d’affréter un navire, avec ou sans aide des institutions. Une seule conviction les rassemble : l’évidence que personne ne devrait mourir en mer. Peu après, l’Aquarius quittait Marseille pour sa première mission de sauvetage, porté par une mobilisation citoyenne qui ne fait que croître et qui alimente, encore aujourd’hui, l’espoir des équipes de sauvetage – c’est « le fuel de l’Ocean Viking », s’accordent à dire les responsables de l’association.

« Tous dans le même bateau »

« La terre est comme un bateau sur lequel il n’y a qu’un seul équipage : on ne peut laisser personne tomber à l’eau » assène Roland Jourdain, navigateur, membre du comité de soutien de SOS MEDITERRANEE, qui défend inlassablement les valeurs de solidarité des gens de mer et soutient l’association depuis des années. « Aujourd’hui ce sont eux, demain ce sera peut-être nous. On est tous dans le même bateau : on a intérêt à rester ensemble dans la barque ! »

Aujourd’hui, 128 collectivités territoriales soutiennent l’association, des centaines de personnalités portent son combat sur la scène publique, 750 bénévoles se mobilisent pour témoigner, plus de 36 000 personnes et plus de 400 entreprises et mécènes font des dons. Chacun s’engage à sa manière, donnant de son temps, de son expertise, de sa voix ou de son argent.

« C’est notre humanité qui est bafouée si nous refusons de secourir ces personnes en pleine mer, quelle que soit la raison du départ. Pour participer à sauver ces personnes nous versons une subvention à l’association. C’est important de pouvoir se regarder dans une glace la matin » affirme Patrice Leclerc, maire de Gennevilliers dans les Hauts-de-Seine, qui a rejoint la Plateforme des collectivités territoriales solidaires avec SOS MEDITERRANEE en 2022.

Ce sont les mêmes valeurs de solidarité et d’humanité qui ont décidé Alice, donatrice retraitée, à nous écrire un jour cette lettre, dans laquelle elle nous informait de sa décision de nous léguer ses biens après son départ : « Je n’ai pas une fortune mais je me dis que si on est nombreux à donner un petit peu, ça permettra de contribuer significativement au financement des opérations de sauvetage. Bien entendu, d’ici mon départ à moi, je souhaite que SOS MEDITERRANEE n’existe plus : j’espère que d’ici là les moyens adéquats de sauvetages auront été mis en place par les États ! Mais pour l’instant, l’association a besoin de moi et je réponds présente. »

Agir, un remède à l’impuissance

Céline, assistante sociale et bénévole à Brest, a choisi de donner de son temps. « Lorsque j’ai découvert la situation en Méditerranée, j’ai ressenti une colère sourde et un sentiment d’impuissance intolérable. Comment pouvais-je agir, moi qui n’étais ni navigante, ni soignante ? Je me suis engagée en sensibilisation scolaire à SOS MEDITERRANEE et par des actions lors de différents évènements. Je pense que le sauvetage en mer est inconditionnel, que chaque fois qu’une vie humaine est perdue faute d’avoir tendu la main, c’est l’humanité toute entière qui perd. Chaque être humain a son histoire, ses rêves, ses espoirs… comment pourrait-on les abandonner sans se mobiliser ? »

À 16 ans, Lola, étudiante en histoire et bénévole à Strasbourg, fait aussi partie des 750 bénévoles de l’association. « J’aime la diversité des activités : expos photo, tenue de stands d’information et de collecte, ciné-débats, sensibilisation scolaire… » Lola a grandi à la montagne, près des « frontières italiennes où tous les jours se jouent des drames ». C’est là qu’est née son « envie d’agir et d’aider, quand j’étais toute petite ». Quand elle a enfin eu l’âge de s’engager, « il m’a semblé logique que ce soit avec SOS MEDITERRANEE. Pour moi, une vie humaine ça n’a pas de prix, et la mer n’a pas vocation à être un cimetière, alors j’agis comme je peux ! »

Chacun peut agir à son niveau

L’engagement se vit aussi dans les entreprises, petites ou grandes, les associations, fondations, structures culturelles et autres mécènes. La Fédération des Mutuelles de France organise ainsi pour la deuxième année consécutive un concert de rap et de techno au profit de l’association avec les rappeurs Zamdane, Soprano, Georgio et bien d’autres têtes d’affiche qui se produisent gracieusement, en partenariat avec la Ville de Marseille. Carole Hazé, vice-présidente de la Fédération des Mutuelles de France, y poursuit aussi un objectif de sensibilisation des jeunes : « en tant que militants mutualistes des droits humains, nous ne pouvons rester aveugles et impassibles à ce qui se passe en mer. Ce concert de soutien vise une prise de conscience sur la situation d’horreur absolue en Méditerranée, devenue un charnier. On parle d’êtres humains qui préfèrent risquer de mourir en mer plutôt que de continuer à vivre avec les traumatismes qu’ils subissent [en Libye] : viols, torture, esclavage, répression… »

Lire l’article sur le concert pour sauver des vies en mer

Des initiatives aussi variées qu’originales nous parviennent enfin chaque jour pour nous soutenir. Un éditeur reverse les profits d’un recueil de poèmes à l’association, un bijoutier en fait de même en concevant une bague, un brasseur imagine une nouvelle bière dont les recettes sont reversées à l’association, une agence de communication fait don de ses honoraires… chacun de sa place peut contribuer. Bien loin du rap, Albane, flûtiste et performeuse, fait partie de ces artistes qui se produisent pour récolter des dons pour SOS MEDITERRANEE. « J’ai créé le spectacle ‘Les gens qui partent’ où mes flûtes conversent avec des témoignages de personnes migrantes. Pour pouvoir partir en tournée à la frontière américano-mexicaine, j’ai lancé un crowdfunding. J’ai proposé à SOS MEDITERRANEE de partager la somme récoltée. Mon spectacle interroge les identités liées aux déplacements. Il m’est apparu important d’associer création artistique et engagement humanitaire. Le choix de SOS MEDITERRANEE a été une évidence. » 

« Il n’y a pas de petit geste… Plus que jamais, notre devise ‘’Together for rescue’’, ensemble pour sauver des vies, résonne au sein de SOS MEDITERRANEE car l’engagement de la société civile n’a jamais faibli ; depuis le premier jour jusqu’à aujourd’hui, c’est d’elle que nous tirons le courage d’agir et de résister aux difficultés » conclut Sophie Beau.

Crédits photo en haut de page : Michel T/SOS MEDITERRANEE

Contenu | Menu | Bouton d