Cette publication de SOS MEDITERRANEE a pour but de faire le point sur les évènements qui se sont déroulés en Méditerranée centrale au cours des deux dernières semaines. Il ne s’agit pas de livrer une revue exhaustive des faits, mais plutôt de fournir des informations sur l’actualité de la recherche et du sauvetage dans la zone où nous intervenons depuis 2016, sur la base de rapports publiés par différentes ONG et organisations internationales ainsi que par la presse internationale.
En 2023, les moyens civils de recherche et de sauvetage manquent en Méditerranée centrale, alors que les tentatives de fuir la Libye par la mer se poursuivent sans relâche.
Le 7 janvier, l’Ocean Viking a secouru 37 personnes d’une embarcation pneumatique surchargée dans les eaux internationales au large de la Libye. L’embarcation impropre à la navigation avec des personnes sur les flotteurs latéraux a été repérée à l’aube, à l’aide de jumelles. Peu de temps après, les autorités maritimes italiennes ont assigné à l’Ocean Viking un lieu sûr où débarquer les rescapé.e.s : Ancône, en Italie. Quatre jours de navigation ont été nécessaires pour rejoindre ce port, à plus de 1 575 km de la zone d’opération.
Le même jour, le Geo Barents, affrété par Médecins Sans Frontières (MSF), a secouru 73 personnes, dont 16 mineur.e.s non accompagné.e.s, d’une embarcation pneumatique surchargée impropre à la navigation, dans les eaux internationales au large de la Libye. Trois heures plus tard, le navire humanitaire a lui aussi été dirigé vers le port d’Ancône, assigné comme lieu sûr par les autorités maritimes italiennes.
Alors que les prévisions météorologiques annonçaient une tempête sur le trajet vers Ancône, les deux navires civils humanitaires ont demandé aux autorités maritimes italiennes la désignation d’un lieu sûr plus proche pour débarquer les personnes secourues. Le 8 janvier, la demande a été refusée au Geo Barents et à l’Ocean Viking. Le 9 janvier, d’après le journaliste italien Sergio Scandura de Radio Radicale, 89 personnes secourues par les garde-côtes italiens ont été débarquées à Augusta.
Le lendemain, après avoir effectué la traversée dans des conditions météorologiques extrêmes, avec des vents de 40 nœuds et des vagues allant jusqu’à six mètres, les 37 personnes rescapées ont finalement débarqué à Ancône le 11 janvier, suivies par les 73 personnes qui se trouvaient à bord du Geo Barents le 12 janvier.
Les moyens aériens civils jouent eux aussi un rôle essentiel dans les opérations de recherche et de sauvetage en Méditerranée centrale : entre décembre 2022 et janvier 2023, l’ONG aérienne Pilotes Volontaires a localisé 92 embarcations avec 885 personnes à bord, au cours de 19 vols.
Un naufrage fait trois morts, et des personnes continuent d’être renvoyées de force en Libye où les attendent détention arbitraire et mauvais traitements.
Le 6 janvier, un naufrage au large de Lampedusa, rapporté par l’agence de presse italienne Ansa, a coûté la vie à trois personnes. Parmi les corps retrouvés, celui d’un enfant d’un an. Un autre nourrisson a pu être réanimé et 29 autres personnes ont été secourues par les garde-côtes italiens. Depuis le début de l’année, 25 vies ont été perdues en Méditerranée centrale, soit un total de 20 247 depuis 2014, selon le Projet Missing Migrants de l’OIM.
En 2022, 24 684 femmes, hommes et enfants ont été intercepté.e.s par les autorités libyennes et renvoyé.e.s en Libye, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), contre 32 425 en 2021.
Depuis le début de l’année et ce jusqu’au 14 janvier, 1 103 personnes ont été interceptées par les autorités libyennes et renvoyées en Libye, d’après l’OIM : 1 067 personnes entre le 1er et le 7 janvier, et 36 entre le 8 et le 14 janvier.
Le 1er janvier, Kidane Zekarias Habtemariam, accusé d’être le passeur « le plus recherché au monde » et faisant l’objet de deux notices rouges d’Interpol demandées par l’Éthiopie et les Pays-Bas, a été arrêté au Soudan en coordination avec les autorités des Émirats arabes unis.
Kidane Zekarias Habtemariam avait été condamné par contumace à la prison à vie par un tribunal éthiopien en juin 2021 après avoir été reconnu coupable d’avoir « affamé et torturé des réfugiés et des migrants africains à destination de l’Europe» dans des entrepôts en Libye.
Audition de plusieurs ONG à la Chambre des députés italienne à la suite du décret de Piantedosi
Après la publication le 5 janvier de la déclaration de 20 ONG de recherche et de sauvetage exprimant leurs « plus graves préoccupations » à la suite d’un nouveau décret sur la sécurité signé par la présidence italienne le 2 janvier et actuellement en cours de conversion en loi, une audience s’est tenue à la Chambre des députés italienne le 16 janvier, avec des représentants de nombreuses organisations civiles.
Crédit photo : Michael Bunel / SOS MEDITERRANEE