Dix jours de « dry dock » pour l’Aquarius
8 juin 2017

Pour la première fois depuis le démarrage de sa mission de recherche et sauvetage en Méditerranée, l’Aquarius affrété par l’organisation civile européenne SOS MEDITERRANEE a quitté Catane samedi sans son équipage de sauveteurs et rejoint le port de Malte pour dix jours de « dry dock », une cale sèche réglementaire.

Après un hiver en mer et 118 opérations de sauvetage en Méditerranée depuis le début de sa mission, mais surtout après avoir accueilli à son bord 19.096 personnes secourues en mer en à peine plus d’un an, l’Aquarius, bateau de SOS MEDITERRANEE a été placé en cale sèche réglementaire pendant dix jours à Malte. Les travaux de manutention et d’aménagements visant à améliorer l’accueil à bord et la sécurité des personnes secourues en mer ont débuté lundi et devraient se poursuivre jusqu’au 15 juin prochain. Dès cette intervention technique achevée, l’Aquarius repartira en mer poursuivre sa mission.

Cette année d’opérations en Méditerranée a été très intense pour l’Aquarius, « qui a été aussi quatre fois grand-mère en un an! » aime rapeller le capitaine de l’Aquarius, Alexander Moroz. Quatre bébés sont nés à bord depuis le début de la mission le 26 février 2016 – Alex, Newman, Favour et Mercy -, une première en plus de quarante ans d’histoire de ce patrouilleur devenu navire humanitaire.

Depuis le début de la mission en février 2016, les sauveteurs de SOS MEDITERRANEE ont opéré de manière continue à bord de l’Aquarius, portant secours à 19.096 personnes lors de 118 opérations de sauvetage. 14.444 personnes ont été secourues directement d’une embarcation en détresse, et 4.652 autres y ont été transférées après un sauvetage par un autre navire. Ces naufragés sont pour la plupart originaires d’Afrique de l’Ouest (Nigeria, Guinée Conakry, Gambie…), de la Corne de l’Afrique Erythrée, Somalie…), d’Afrique du Nord et de Syrie mais aussi, depuis cet hiver, du Bangladesh. Tous ont en commun d’avoir transité par la Libye et fuient pour la plupart les violences quotidiennes dans ce pays et les traitements inhumains qui leur ont été infligés par des miliciens et des trafiquants d’êtres humains.

« Avant le départ pour la cale sèche, le bateau était vide mais dans les coursives c’était comme si les voix des milliers de naufragés secourus en pleine mer résonnaient encore. Les témoignages de l’enfer qu’ils ont vécu dans le désert, puis en Libye – où ils ont été battus, humiliés, kidnappés, rackettés, torturés et soumis à des violences sexuelles répétées – puis au cours de la traversée en mer continuent de nous hanter, même une fois à terre » confiait l’un des membres de l’équipage de SOS MEDITERRANEE, alors que l’Aquarius quittait le port de Catane.

« Lorsque l’Aquarius est parti en mer pour la première fois il y a un an, jamais nous n’aurions imaginé nous retrouver confrontés à une tragédie d’une telle ampleur. Alors que l’Aquarius est en cale sèche, nous continuons de suivre avec une intense préoccupation et avec une profonde solidarité les opérations de sauvetage menées par les gardes côtes italiens et par les autres ONG présentes en mer. Dès que les travaux de manutention seront terminés, nous repartirons immédiatement poursuivre notre mission : sauver des vies en mer » explique Sophie Beau, vice-Présidente et cofondatrice de SOS MEDITERRANEE.

  « Comment l’Europe et ses dirigeants peuvent-ils ne pas éprouver le même sens des responsabilités? L’impératif du sauvetage en mer, obligation légale et morale, ne peut être abandonné aux seules ONG, ni à l’Italie. L’été arrive et tout porte à croire que la situation sera plus chaotique que jamais en Méditerranée. Il y a donc plus que jamais urgence!».

Photo : Marco Panzetti