PACTE EUROPÉEN SUR LA MIGRATION ET L’ASILE : Nouvel accord sur un mécanisme solidaire de relocalisation des personnes secourues en mer
11 juillet 2022

Dans le cadre de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne, la France s’est fixé comme objectif d’avancer, de manière graduelle, sur les négociations autour du nouveau « Pacte européen sur la migration et l’asile ». La thématique des opérations de recherche et de sauvetage en mer par des navires civils a fait l’objet de négociations, de même que celle de la relocalisation des personnes ainsi secourues. Quelles avancées peut-on constater au lendemain de la Présidence française qui a pris fin le 30 juin dernier ?

Une lettre* d’interpellation du Président Macron, signée par 70 collectivités solidaires

SOS MEDITERRANEE a partagé son expertise de terrain avec l’État tout au long de la présidence française de l’UE en mettant l’accent sur les conséquences terribles du manque de coordination et de moyens en Méditerranée centrale.

Le 11 mai, 70 représentantes et représentants de collectivités territoriales ont, à leur tour, interpellé le Président Emmanuel Macron sur la crise humanitaire qui perdure en Méditerranée centrale depuis 2014 et encouragé la présidence française à s’investir pour que les opérations de recherche et de sauvetage soient traitées au mieux dans les futurs accords européens.

Adoption d’un accord européen pour un « mécanisme volontaire de solidarité »

Le 10 juin, les ministres de l’intérieur des États membres de l’UE et des États associés à l’espace Schengen se sont réunis pour un Conseil « Justice et affaires intérieures », qui fut le dernier sous la présidence française de l’UE. À cette occasion, la France a proposé un accord volontaire sur le modus operandi d’un mécanisme européen de solidarité pour la relocalisation des personnes secourues en mer par des navires civils. Le 22 juin, 18 États membres et 3 États associés à l’espace Schengen** ont confirmé leur participation au mécanisme de solidarité avec les États côtiers européens (Italie, Grèce, Espagne, Malte et Chypre – groupe dit des MED 5) en première ligne pour l’accueil et la prise en charge des personnes secourues en mer.

Les États qui rejoignent cet accord ont l’option de relocaliser des personnes rescapées sur leur territoire. De plus, la proposition française prévoit d’autres alternatives : quand les relocalisations ne sont pas possibles pour un État membre, ce dernier s’engage à participer à la solidarité en apportant aux pays côtiers européens une contribution financière ou un soutien (service, personnel, installations) dans les domaines de l’accueil, la surveillance et le contrôle des frontières, la détention et les retours. Une autre option proposée est de soutenir financièrement des projets dans des pays tiers qui auraient « un impact direct sur les flux à la frontière extérieure ».

Un premier pas, mais qui ne répond pas à l’ampleur du drame humanitaire en Méditerranée

SOS MEDITERRANEE considère que cet accord est une première étape pour répondre au besoin critique d’un mécanisme de débarquement prévisible dans le respect du droit maritime. L’association espère qu’il mettra fin aux longues attentes imposées aux navires humanitaires avant le débarquement des rescapé.e.s. La tendance actuelle observée ces derniers mois est alarmante : les personnes secourues par l’Ocean Viking en mai et juin ont passé jusqu’à dix jours à bord du navire avant d’obtenir l’autorisation de débarquer dans un lieu sûr. Il est donc essentiel que les États membres de l’UE le mettent en œuvre sans délai, en choisissant l’option de relocalisation. L’association espère, par ailleurs, que le soutien financier proposé aux pays tiers ne se traduira pas par une augmentation des aides financières attribuées aux garde-côtes libyens. Au moins 8 860 personnes, confrontées à un cercle arbitraire de violation des droits de l’homme, ont été renvoyées illégalement en Libye cette année.

Il est par ailleurs important de souligner qu’en tout état de cause, cet accord ne répond pas à l’ampleur du problème rencontré en Méditerranée centrale où l’on constate un manque alarmant de moyens. Il est urgent d’augmenter le nombre de navires capables de rechercher et de secourir les personnes en détresse sur la route migratoire maritime la plus meurtrière au monde.

Depuis le début de l’année, faute de secours suffisants, près de 1 000 personnes ont péri noyées en Méditerranée (dont 80% sur la route de la Méditerranée centrale).


* Cette lettre d’interpellation est une initiative de trois collectivités : les Départements de Loire-Atlantique et d’Ille-et-Vilaine, la Ville de Lyon. Son texte a été rédigé par le Département d’Ille-et-Vilaine. Pour recevoir une copie cette lettre, vous pouvez vous adresser à l’équipe de mobilisation des collectivités : partenariat@sosmediterranee.org.

** Belgique, Bulgarie, Chypre, République tchèque, Allemagne, Grèce, Espagne, Finlande, France, Croatie, Irlande, Italie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Portugal, Roumanie, Norvège, Suisse, Liechtenstein.

Crédits photo : Jérémie Lusseau /SOS MEDITERRANEE