« Le dernier maillon de la chaîne, ce sont les marins-sauveteurs ; mais on se tient tous la main, en commençant par les bénévoles. »
Élu président bénévole le 15 juin 2019, François Thomas fait part de son enthousiasme quant à ses fonctions malgré les imprévus auxquels l’association a fait face au long de cette dernière année. Une résilience, selon lui, qui n’est possible que grâce aux bénévoles qui constituent le cœur de l’association.
D’officier de la marine marchande à président de l’association
François est marin de formation. Il a passé sa vie dans le secteur maritime. En 2017, la directrice adjointe de SOS MEDITERRANEE, Fabienne Lassalle, est venue présenter l’association au comité sécurité d’Armateurs de France dont François était l’un des membres. A l’époque, le manque de temps et ses nombreux déplacements internationaux ne lui avaient pas laissé l’opportunité de s’engager.
En 2018, l’errance de l’Aquarius dans les eaux internationales puis les retraits de pavillon l’avaient profondément choqué. « C’était contraire aux valeurs d’humanité, de solidarité et c’était contraire au droit maritime. » Il s’est alors rendu dans les rues en octobre de la même année, comme des milliers de citoyens, pour manifester son soutien et constituer la fameuse vague orange.
A la fin de l’année 2018, à l’approche de sa retraite, il a assisté à une conférence animée par l’ancien Président de l’association, Francis Vallat et s’est porté bénévole. « La solidarité des gens de mer, c’est ce que j’ai toujours vécu. Être dans une association humanitaire et de sauvetage en mer c’était très cohérent avec ma carrière de marin. »
« Ces personnes engagées en Europe, cela donne un grand espoir. »
En arrivant dans l’association, il se dit frappé par le professionnalisme des équipes et en particulier des marins-sauveteurs. « J’étais plutôt impressionné par leurs compétences, leur niveau d’entraînement. Le sauvetage de masse est très compliqué. C’est impressionnant de voir leur capacité permanente à capitaliser sur leurs expériences. »
François salue le dynamisme dont font preuve les bénévoles et les salariés : « les membres de l’association sont très réactifs et compétents face aux événements toujours inattendus que peut rencontrer SOS MEDITERRANEE. »
François Thomas, lors de l’Appel du 8 juin 2019 à Bordeaux. Crédit photo : Zoé Manhes
Il se rappelle ses premières rencontres avec les bénévoles : « toutes ces personnes engagées en Europe, cela donne un grand espoir. » C’est pour cela qu’il désire être au plus proche des bénévoles, être présent lors des événements pour les soutenir dans leurs missions. « Le dernier maillon de la chaîne, ce sont les marins-sauveteurs ; mais on se tient tous la main, en commençant par les bénévoles dans les antennes. »
Faire respecter le droit maritime international
En tant que président, il a dû s’habituer à la médiatisation très forte à son arrivée en raison du retour en mer du nouveau navire de l’association, l’Ocean Viking. Il était également surpris par l’ampleur des « infox auprès des personnes réticentes ou peu informées. »
Mais le plus difficile a été de voir l’errance du navire suite au premier sauvetage après son retour en mer. « Il a fallu attendre le bon vouloir des Etats européens pour obtenir un lieu sûr de débarquement. Chaque jour qui passait, les conditions physiques et psychologiques des personnes sur le navire se dégradaient face à l’attente et l’inconnu. »
« Quand on lit les témoignages tels que dans le livre de Marie Rajablat, “les naufragés de l’enfer”, on est au plus profond de cette souffrance. C’est beaucoup d’émotions, de révoltes. Alors quand on voit le bateau qui attend aussi longtemps c’est insupportable d’injustice et d’incompréhension. »
Il rappelle que ces conditions d’attente sont causées par les Etats qui ferment leurs ports aux navires de sauvetage et cela en totale infraction du droit maritime. « C’est le rôle de SOS MEDITERRANEE d’essayer d’établir un dialogue avec eux pour qu’ils trouvent des solutions à l’échelle européenne. » Cependant, il s’attriste de l’attitude poussive de la part des européens. « Malheureusement ça ne s’améliore pas et c’est aussi difficile à vivre. Il faut malheureusement des drames pour qu’on en parle et même quand on en parle, les actions tardent à être prises et sont insatisfaisantes. »
François a à cœur de représenter cet ADN citoyen et se dit, d’ailleurs, très enthousiaste quant à la campagne de mobilisation citoyenne 2.0 baptisée « Tous Sauveteurs ». « Les témoignages des personnes qui nous soutiennent sont très forts et très divers. Chacun a ses expériences, son recul, son engagement. Cette campagne permet de donner une voix à ceux qui participent à sauver des vies. »
Crédit Photo : David Orme / SOS MEDITERRANEE