Les organisations humanitaires de sauvetage en mer, seuls témoins de la catastrophe meurtrière en Méditerranée centrale 

Marseille, le 14 juin 2024 – Les 7 et 8 juin 2024, une nouvelle catastrophe a été révélée en Méditerranée centrale, après la découverte d’au moins 17 corps, repérés flottant à la surface de la mer. 12 d’entre eux ont pu être recueillis par les navires civils de secours et de sauvetage Geo Barents (MSF Sea) et Ocean Viking (SOS MEDITERRANEE). Ces corps sont autant d’indices d’un naufrage durant lequel un nombre indéterminé de personnes sont mortes.  

Ce désastre, qui survient quelques jours avant la date anniversaire du naufrage de l’Adriana, vers Pylos en Grèce, est une nouvelle conséquence des politiques migratoires européennes et de la non-assistance aux personnes qui traversent la Méditerranée.  

Le tollé exprimé par les responsables politiques européens il y a un an et l’absence totale de réaction aujourd’hui révèlent toute leur hypocrisie et leur inaction pour mettre un terme aux décès en mer.  

Les corps ont été repérés lors d’une patrouille d’un avion de Sea-Watch : « Nous avons vu d’autres corps, qui sont toujours en mer », a déclaré Tamino Böhm, qui faisait partie de l’équipe qui a découvert les personnes décédées. « Ces morts ne sont pas le résultat d’un accident imprévisible mais bien de décisions politiques calculées par l’Union européenne : voici à quoi ressemblent les politiques européennes en matière de frontières. »  

Le fait que ces corps aient été en mer pendant plus d’une semaine avant d’être découverts montre une nouvelle fois combien l’observation aérienne civile en Méditerranée est nécessaire.  

Pourtant, cette surveillance humanitaire est aujourd’hui menacée : l’autorité italienne de l’aviation (ENAC) tente actuellement d’interdire les opérations aériennes de Sea-Watch. « Si cette tentative réussit, il n’y aura plus de témoins de tels décès », a déclaré M. Böhm.  

Ce sont les organisations civiles MSF et SOS MEDITERRANEE qui ont récupéré les corps. « S’il n’y avait pas eu de navires et d’avions humanitaires de recherche et de sauvetage, cette tragédie n’aurait très probablement été qu’un énième naufrage invisible en Méditerranée. Nous savons que d’autres corps ont été repérés en mer, qui n’ont pas pu être recueillis. Nous ne connaitrons jamais l’identité de ces personnes, ni le nombre de victimes qui ont péri dans ce naufrage », indique Soazic Dupuy, directrice des opérations de SOS MEDITERRANEE. « La recherche et le sauvetage humanitaires pallient un angle mort en Méditerranée – l’obstruction et la criminalisation de notre mission vitale doivent cesser. » 

« Nous avons reçu plusieurs demandes de familles qui nous indiquent avoir perdu le contact avec leurs proches qui ont pris la mer. Nous demandons aux autorités italiennes de mettre immédiatement en place les mécanismes médico-légaux appropriés pour collecter et documenter les profils ADN des personnes décédées » a déclaré Juan Matias Gil, responsable des opérations de recherche et de sauvetage de MSF. « L’identification correcte des victimes est un devoir pour aider les familles à obtenir des réponses sur la disparition de leurs proches. »