« L’ami d’un ami a tenté la traversée, il est resté en mer pendant 12 jours, jusqu’à ce qu’il y ait suffisamment de réseau pour appeler les secours. Il a survécu. »
Né à Beyrouth en 1991, Karim a commencé à faire du bénévolat pour l’ONG Offre Joie à l’âge de 14 ans, œuvrant ainsi à la réconciliation nationale après la guerre civile qu’a connu le Liban de 1975 à 1990. Offre Joie organisait des camps d’été pour les enfants de factions opposées durant le conflit, qui venaient souvent de régions du pays encore en proie à la violence. À 16 ans, Karim s’est porté volontaire pour un projet de reconstruction de prisons en mauvais état qui ne respectaient pas les exigences légales, avec pour objectif la création d’un accès universel aux droits humains fondamentaux – un leit motiv qui encore aujourd’hui, guide son travail.
Karim a étudié la santé publique et les sciences de l’environnement. Lorsque le conflit en Syrie a éclaté, quelques jours seulement après avoir obtenu son diplôme, il a commencé à travailler avec des réfugié.e.s syrien.ne.s hébergé.e.s dans des campements faits de tentes et de bâtiments en construction. En tant que responsable sanitaire sur le terrain pour ACTED, Karim a travaillé dans le domaine de l’hygiène et de la promotion de la santé. Il a ensuite œuvré dans le domaine de l’eau, de l’assainissement, des abris, de la santé et des programmes de politique sociale au Kurdistan, en Jordanie, au Bangladesh, au Nigeria et au Liban.
Photo : Karim en plein entraînement avec sa collègue Christine, la responsable de l’équipe médicale. (crédit photo : Fabian Mondl/SOS MEDITERRANEE)
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Le premier contact que Karim a eu avec la problématique de la recherche et du sauvetage en Méditerranée était d’ordre personnel. « Au Liban, certaines des personnes réfugiées syriennes avec lesquelles je travaillais sont devenues des ami.e.s très proches. Ce sont des jeunes comme nous, ils venaient juste de l’autre côté de la frontière. Ils avaient tous des histoires d’amis ou de membres de leur famille qui avaient traversé la Méditerranée. On en parlait tous les jours même en 2012, 2013, avant qu’on en parle dans les médias. Les migrations à travers la Méditerranée ont toujours existé, mais cela n’était pas encore clair à l’époque que la Méditerranée centrale deviendrait une route migratoire établie. L’ami d’un ami a tenté la traversée, il est resté en mer pendant 12 jours, jusqu’à ce qu’il y ait suffisamment de réseau pour appeler les secours. Il a survécu. »
Photo : Avec 374 personnes à bord en ce mois de janvier, l’équipe de prise en charge des rescapé.e.s dont Karim a la charge est sollicitée jour et nuit. Ici devant l’abri des femmes et des enfants sur l’Ocean Viking. (crédit photo : Hippolyte)
Malgré cette expérience personnelle, Karim n’imaginait pas qu’il travaillerait un jour sur un bateau de sauvetage : « Je suis allé à une représentation artistique d’un artiste syrien une fois à Beyrouth. C’était au bord de la mer et il a emmené tout le monde sur un bateau en bois, une vingtaine d’entre nous sur un petit canot, pour vivre l’expérience d’un début de voyage. Cela m’a profondément marqué, mais à l’époque je ne pensais pas que je serais un jour sur un bateau de sauvetage, parce que je combattais ce sentiment anti-migrant chez moi, sur le terrain, au Liban. »
Karim s’est embarqué pour la dixième mission de l’Ocean Viking en tant que responsable de l’équipe de prise en charge des rescapé.e.s et a déjà commencé à travailler sur la mise-à-jour des procédures d’orientation pour s’assurer qu’un maximum de personnes recevront une protection après leur débarquement de l’Ocean Viking. Il a aussi établi la planification des « routines » à bord et la mise en place d’espaces permettant une vie digne pendant le peu de temps que les rescapé.e.s passent sur le navire après leur sauvetage.
(crédit photo : Fabian Mondl/SOS MEDITERRANEE)