Les nourrissons et les jeunes enfants sont le plus souvent en « phase de choc, de peur et de sidération » lorsque nous les secourons d’une embarcation en détresse. Avec douceur et patience, Marylène les ramène à cette spontanéité si naturelle chez les plus petit.e.s.

Lorsque les équipes de SOS MEDITERRANEE arrivent à proximité d’une embarcation en détresse, dès que les gilets de sauvetage sont distribués et la situation stabilisée, les enfants sont transféré.e.s sur les canots de sauvetage où un.e membre de l’équipage est en charge de les sécuriser. À leur arrivée à bord de l’Ocean Viking, la sage-femme les accueille. Ses premiers gestes seront pour les calmer, les réchauffer et vérifier qu’ils vont bien.

En tant que professionnelle de la santé, il lui revient d’examiner les femmes, les enfants et les nouveau-nés d’un point de vue médical, puis tout au long de leur séjour, de vérifier que les plus jeunes « reçoivent un biberon régulièrement, qu’ils aient de quoi manger » et qu’ils reprennent des forces.

Rassurer puis ramener de la joie de vivre à bord

Une fois leurs besoins fondamentaux assurés, Marylène met tout en œuvre pour « ramener un petit peu de joie et de vie pour ces enfants qui ont eu l’habitude d’être beaucoup entourés d’adultes, qui ont traversé un enfer avant d’arriver là.  Le plus important est de les rassurer, de leur parler tout doucement, de les amener dans un endroit où ils et elles peuvent se sentir en sécurité » et se reposer, le plus souvent l’abri des femmes, où seul.e.s les enfants de 12 ans et moins et les femmes sont admis.es.

« Juste le fait de les entourer avec la couverture, de leur donner de quoi manger, de quoi s’hydrater, des petits jeux, une petite peluche, peut les amener à être un peu plus apaisés » explique Marylène, qui vient de terminer sa troisième mission à bord. Son sourire est certainement l’un de ses plus grands atouts pour calmer tout ce petit monde.

Le visage de ces enfants qu’elle accueille est souvent très fermé au départ. Certain.e.s ont fui la guerre avec leurs parents ou seul.e.s, d’autres ont connu la faim, la soif dans le désert, ont assisté à des violences indicibles, ont perdu des proches, avant la périlleuse traversée de la Méditerranée. « Ce qui est le plus difficile quand on s’occupe des enfants et des bébés, c’est de se rendre compte qu’ils n’ont plus cette spontanéité, cette joie commune à tous les enfants ». Et c’est précisément la tâche la plus délicate de Marylène que de « les ramener, progressivement, à une certaine légèreté, à les faire revenir à leur état d’enfant et enlever les ‘’lunettes d’adulte’’ ».

Jouer, danser, colorier…

Avec les moyens du bord, Marylène et les membres de l’équipe s’ingénient à ranimer la flamme dans leurs yeux en passant par des temps ludiques. « On n’a pas forcément beaucoup de jeux à bord, mais ça peut être tout simplement de faire du dessin, du coloriage, des séances de mimes, de la danse (…) pour retrouver cette spontanéité enfantine. »

« Sur ma première rotation, l’équipe et les rescapé.e.s, avaient fabriqué une balançoire sur le pont » raconte-t-elle. « C’était absolument merveilleux de voir que, comme n’importe quels enfants dans n’importe quel parc de jeu ; tout le monde voulait en profiter. »

Jamais à court d’idée, Marylène a des dizaines d’histoires sur les plus jeunes des rescapé.e.s, « Un jour on a voulu faire une petite projection de film pour les enfants dans l’abri des femmes mais le rétro-projecteur était en panne. On a fini par s’amuser à faire des ombres chinoises avec la lumière du projecteur !  C’était vraiment chouette parce qu’on était dans la créativité et dans l’imagination, et les enfants sont trop forts pour ça ! »

En-dehors des missions à bord de l’Ocean Viking, Marylène travaille aux urgences de Marseille. À l’occasion, elle intervient également lors de séances de sensibilisation scolaire aux côtés des bénévoles de SOS MEDITERRANEE, où elle peut poursuivre cette connexion avec les jeunes qui lui est si naturelle. « Le témoignage fait aussi partie de l’action de SOS MEDITERRANEE : ramener en direct ce qu’on peut expérimenter et vivre en mer, avoir des discussions en direct avec les jeunes, je pense que c’est important pour contrer les ‘’fake news’’ qui circulent » conclut-t-elle.

Télécharger le Recueil de témoignages Jeunesse naufragée

Crédit photo en haut de page : Yannick Taranco / SOS MEDITERRANEE